Retour sur une campagne de pub qui a fait couler beaucoup d’encre au moment de son lancement : celle du fameux site extraconjugal Ashley Madison, géant des rencontres adultères en ligne. Le sujet de la publicité en question ? L’infidélité, bien sûr, mais sous un angle tout à fait inattendu : l’accent y était en effet mis sur les présidents français et leurs petites incartades plus ou moins célèbres… En utilisant les photos des quatre derniers présidents français, le site a donc tenté de faire le buzz en instillant humour et provocation dans une campagne de pub destinée au marché français. Mais ce que l’on sait moins, c’est que cette pratique était totalement illégale.
Un coup marketing risqué
Créé en 2002 à Toronto par le Canadien Noel Biderman, Ashley Madison prend le parti d’encourager l’adultère par le biais de slogans accrocheurs et d’un design branché. Et en matière de pub, la société sait s’y prendre pour attirer l’attention des éventuels utilisateurs. La campagne lancée en France en 2012 montrait ainsi François Mitterrand, Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et François Hollande en » flagrant délit » d’infidélité grâce à l’ajout de traces de rouge à lèvres sur leur visage. Ces quatre photos étaient accompagnées du slogan » Quel est leur point commun ? Ils auraient dû penser à Ashley Madison « . Ainsi, on devine aisément l’objet de ce montage : s’ils avaient utilisé le site adultère pour trouver leurs conquêtes et tromper leur compagne, ils n’auraient pas eu à affronter de scandale ! Une telle pratique est illégale, puisqu’il s’agit d’utiliser l’image de personnes sans leur autorisation pour véhiculer un message pouvant leur porter préjudice. En l’occurrence, les allégations d’infidélité ne sont ni à prouver ni à prendre en compte dans cette affaire, puisque c’est principalement l’utilisation des images sans l’accord des protagonistes qui a fait débat. En effet, la loi française stipule que l’on ne peut utiliser l’image d’une personne sans son accord, et l’initiative prise par les commerciaux d’Ashley Madison représentait donc un coup marketing particulièrement risqué…
Quelles sanctions pour cette pub ?
Si le coup marketing était ainsi assuré, les sanctions financières possibles n’étaient guère négligeables. En effet, comme le rappelle le site du Nouvel Obs, si François Mitterrand et François Hollande étaient quelque peu hors course pour des dommages et intérêts (l’un étant décédé, l’autre étant encore en fonction et donc peu en mesure de réclamer de grosses sommes d’argent en guise de compensation), les choses étaient différentes pour Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy, qui auraient eux pu engager des poursuites sérieuses à l’encontre de la plateforme. Dans cette optique, on peut dire que le site s’en est plutôt bien sorti, puisque leur campagne de pub n’a rien provoqué de catastrophique à ce niveau-là. Néanmoins, des questions d’éthique se posent suite à une telle affaire : en effet, si le site Ashley Madison utilise ainsi des photos de présidents français sans leur accord, qu’en est-il des photos de profil de ses membres ?
Peut-on faire confiance à Ashley Madison ?
Le débat reste largement ouvert afin de savoir si un site qui utilise de tels procédés peut s’avérer fiable pour les utilisateurs. Est-ce forcément lié à une forme d’escroquerie ou d’arnaque ? Fort de plusieurs dizaines de millions d’abonnés de par le monde, Ashley Madison a en tout cas bénéficié de ce coup marketing qui lui a permis de faire le buzz sur la toile, et qui a fait beaucoup parler les internautes. Si certains se sont offusqués, d’autres ont trouvé l’initiative amusante, semblable à une caricature. De plus, rire des hommes politiques reste une pratique assez courante en France, où la liberté d’expression tient une place particulièrement importante dans les mentalités, et où la censure est par conséquent très mal vue. C’est pourquoi les retombées n’ont pas permis de déstabiliser le site adultère, qui savait en se lançant dans cette aventure que les Français se montreraient relativement tolérants à l’égard d’une telle provocation. Comme indiqué dans cet article du Parisien, le site n’en était en tout cas pas à son coup d’essai lors du lancement de cette campagne audacieuse. En effet, d’autres dirigeants étrangers avaient déjà eu affaire à une telle pratique pour servir les intérêts marketing de l’entreprise : Silvio Berlusconi en Italie, Boris Johnson au Royaume-Uni ou encore Mitt Romney aux Etats-Unis. De quoi ne pas se faire que des amis au sein de la clique politique de la planète ! Cela ne semble néanmoins pas poser de problème au créateur du site, Noel Biderman, qui a atteint son but premier : faire parler de son site.